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Atelier d’écriture #1 : Écho et silence

Écho et silence

Suite à un atelier d’écriture que j’ai proposé à El Capitan sur le thème Écho et silence, avec trois mots suggérés : Rivage, Lanterne, Mécanisme et Encre, j’ai écris ce petit conte que voici !
Je vais proposer ça régulièrement. Bonne lecture !
Disclaimer : (j’ai utilisé de l’IA pour réfléchir à la construction du récit)


Jusqu’à la Relève

Il était un petit plateau montagneux que ses falaises lançaient bien au-dessus d’un océan de nuages.
Tout en haut de ces falaises, il y avait un homme qui gardait un phare.
Il guidait des navires qu’il n’avait jamais vus en alimentant l’éclat d’un grand feu.
La lanterne s’illuminait chaque soir.

La salle des lumières, juste dessous de sa chambre était remplie de mécanismes ingénieux, tous dédiés à l’entretien du brasier majestueux.
Dessinant des volutes hypnotiques, on devait sans doute le voir à des distances fantastiques.
Sur une vieille affiche clouée sur la pierre du linteau, figuraient ces mots :

Jusqu’à la relève.

Alors, jour après jour et depuis aussi longtemps qu’il pouvait se le rappeler, il effectuait sa tâche.
Les jours se ressemblaient. Depuis ces marches de pierre usées et polies, les vents soufflaient sans relâche.

Le matin, avant que le soleil ne perce l’horizon plat et nacré, il commençait par s’occuper de son potager qui était juste à côté.
C’était un maigre carré de verdure aux airs malheureux où poussaient péniblement des légumes chétifs, secs et sableux.
Il les arrosait, mais l’eau semblait disparaître aussitôt.
Absorbée par une terre devenue trop légère, faite de mottes visiblement bien palotes.

Puis venait la coupe du bois. Autour du manche noueux de sa hache, il enroulait ses gros doigts.
Sur le plateau était une petite forêt, enfin il restait surtout quelques bosquets isolés.
Il cherchait un arbre encore assez robuste pour alimenter le feu du soir et chaque jour, il finissait un peu plus tard.
Il trouvait un tronc, évaluait sa taille, calculait avec précision combien de nuits les buches lui permettraient de faire son travail.
Puis, avec résolution, il frappait.

À chaque arbre tombé, le vent soufflait plus fort. À chaque souffle, le sable rampait plus loin.
Il glissait entre les pierres, s’accrochait aux marches et étouffait le jardin.
L’homme ne s’en inquiétait pas outre mesure.

Tout ce qu’il voyait, c’était que le bois s’amenuisait.
Tout ce qu’il entendait, c’était le grondement du fourneau lorsqu’il des bûches y étaient jetées.
Tout ce qu’il savait, c’était que sans faute, la lumière devait briller.

Jusqu’à la relève.

Il y avait aussi le chat, une ombre malicieuse à ses côtés, le seul à troubler ce cycle parfait.
Bondissant sur la table pendant que l’homme coupait ses légumes. Il guettait chacun de ses gestes, souple et léger comme la plume.
Il miaulait quand l’on s’attardait trop longtemps devant le feu et trouvait toujours une place au chaud sur le lit moelleux.

Chaque matin, le chat attendait devant la porte, assis comme une sentinelle.
« Tu es plus pressé que moi », grognait le gardien à son compagnon fidèle.
Chaque matin, il lui servait sa part, posant le bol toujours au même endroit, sans même y penser.
Il y avait de la douceur dans son regard.

Puis vint le jour où le chat disparut.

L’homme l’appela, chercha derrière les tonneaux, dans la réserve où le chat aimait se cacher. Il vérifia sous la vieille chaise où il dormait d’habitude.

Rien.

Le gardien fronça les sourcils, “où était donc cet imbécile” ?
Il fit ce qu’il n’avait pas fait depuis longtemps. Quitta son domaine en grondant.
Ses jambes raides l’emmenèrent jusqu’au bord des falaises où l’île s’effilochait en rochers abrupts.
Il suivit les sentiers escarpés qu’il n’empruntait plus et sentit nettement sous ses pas, que l’érosion gagnait du terrain.

Et là, tout en bas, il vit son chat, tout immobile face à l’horizon.
Dans un profond silence, il était assis là, où – jadis – on aurait situé le rivage et contemplait le vide.
Le gardien s’arrêta et inspira lentement.

Une plaine de sel et de roche, vide et sombre sous les nuages sans soleil. S’étendant à perte de vue, un désert blanc dont émergeait l’arête des dunes.
Il n’y avait jamais eu de mer. Ou alors, cela faisait bien longtemps qu’elle était partie. Qui aurait pu s’en rappeler ?

Il soupira et resta là, un soupir long et creux, comme un vent éteint.

L’homme jeta un œil derrière lui, vers le sommet de la falaise.
A travers l’encre profonde de la nuit tombante, il vit la faible lueur de son phare, perçant les nuages.
Il se baissa, prit le chat sur son épaule et se hâta de remonter la falaise, comme il l’avait fait à chaque fois.
Si quelqu’un avait tendu une oreille près de sa barbe, il aurait entendu marmonner:

Jusqu’à la relève.